Charles Eugene Gabriel de Virot de Sombreuil (1770-1795), militaire

Lettre autographe signée (paraphe), Stade [Allemagne], le 30 mai 1795, adressée au journaliste Jean-Gabriel Peltier

2 pages in-8

Très rare lettre du jeune brigadier général Sombreuil, émigré monarchiste enrôlé dans la contre-Révolution.

Placé au service de la Russie et des Prussiens, notamment à Valmy, il apprend en 1794 l’exécution de son père par le gouvernement de Robespierre. Décidé à combattre les armées révolutionnaires sur le Rhin et en Hollande, il se fait remarquer de ses supérieurs qui lui confient d’importantes responsabilités. C’est à ce moment charnière que Sombreuil rédige cette lettre, quelques semaines avant de se lancer, à la tête de 1500 hommes – la division de Sombreuil – dans l’expédition de Quiberon, épisode sanglant au cours duquel il trouvera la mort en juillet 1795.

Dans cette lettre – secrète – Sombreuil demande à son correspondant, le journaliste royaliste émigré en Angleterre Peltier, d’assurer dans sa revue la promotion de son action militaire, malgré les doutes qui l’assaillent :

« Pour vous seul

Je vous envoie, mon cher Pelletier, un assemblage d’injures, de mensonges, et d’impertinences que je vous aurais évité la peine de lire sans la nécessité absolue de mettre au jour la vérité, et de faire cesser les propos et inculpations odieuses si souvent réitérés dans la feuille d’Hambourg à l’instigation sans doute de gens qui ne nous veulent point de bien ; tirez de cette matière ce que vous en croirez convenable, et vous ne vous avancerez pas trop, je vous en réponds, en assurant le public qu’il n’y a pas d’exemple d’une garnison aussi paisible et d’une discipline plus exacte que celle des troupes qui se trouvent dans cette ville et les environs. Croiriez-vous que l’audace de la R. a été jusqu’à vouloir faire sortir Mgr du territoire de l’électorat (1)…Nous sommes toujours dans une grande incertitude sur notre destinée, l’armée prussienne a rompu toute communication avec l’ennemi depuis le traité avec la Hollande (2). Nonobstant les magasins énormes que font les commissaires prussiens, les troupes continuent leurs marches rétrogrades.

Adieu mon cher Pelletier, j’espère sous très peu de jours avoir le plaisir de vous voir dans votre brillante capitale (3), j’ai besoin de repos, et je vais le prendre près de Madame S. Croyez aux sentiments bien sincères que je vous ai voués pour la vie.

S[OMBREUIL]

Langeron (4) est toujours à Vienne entre les mains de la faculté »

(1) L’on peut interpréter ce R. comme « République », et il pourrait s’agit du Prince-Electeur de Trêves Clément Wenceslas de Saxe qui a dû fuir six mois plus tôt les armées révolutionnaires françaises.

(2) Traité de La Haye, mai 1795 soit 15 jours avant notre lettre : la République Française et les Provinces-Unies, récemment renommées République Batave, viennent de conclure un accord de défense contre les offensives britanniques et prussiennes.

(3) Sombreuil s’embarquera quelques jours plus tard vers l’Angleterre, d’où il réembarquera pour Quiberon

(4) Alexandre Louis Andrault de Langeron (1763-1831), général français émigré, passé au service de la Russie. Paul 1er l’envoie à cette époque auprès de du prince de Saxe-Cobourg qui commande les armées autrichiennes en guerre contre la France.

Rare témoignage. 

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