[Napoléon Bonaparte (1769-1821), Empereur]

[Claude-François de Malet (1754-1812), Général]

Lettre autographe, [Paris ?], le 3 novembre 1812, adressée à M. Isoard, Grand Prevost à Aix-en-Provence

1 page in-4, adresse autographe, petit trou dû à l’ouverture du cachet

Très intéressante relation du coup d’Etat de Malet par un témoin qui semble avoir été dans la confidence, avant la publication officielle des détails du complot :

« Je me réfère a ma dernière lettre. Depuis lors vous aurez appris par les papiers publics la punition de quelques individus qui ont troublé Paris pendant quelques heures.

Un ex-général Mallet qui étoit dans une maison de sûreté s’en évada le jeudy vers 9 h. du soir, se transporta dans une caserne dont il seduisit les officiers et les soldats au moyen de fausses nouvelles et de faux ordres, fit au moyen de ceux-ci sortir de prison d’autres ex-généraux ou individus et vers le jour se repandant par tout Paris avec ceux qu’il avoit gagnés, s’empara du ministre et du préfet de police qu’il fit conduire en prison, vint pour en faire autant au commandant de la place à qui, comme il résistoit, il trouva plus court de tirer un coup de pistolet et s’étant transporté à l’état-major pour s’en assurer, y trouva la fin de ses excès ; car l’archi-ch[ancelier] averti enfin et les ministres réunis envoyèrent de tout côté pour contredire les bruits et les ordres, réunirent les troupes, firent désarmer les soldats dont se servoit Mallet et celui-ci aux prises avec les officiers de l’état-major, put etre arreté dans ces entrefaits et conduit en prison où tous ses complices furent bientôt réunis.

De suite une commission militaire fut assemblée et jeudy dernier ils ont subi au nombre de douze leur jugement. On dit que dans la nuit Mallet avoit changé les divers postes et les mots d’ordre. Presque tout Paris n’a connu ces événemens que quand les perturbateurs etoient déjà arrêtés. Les détails du complot ne sont pas parfaitement connus, n’ayant pas été officiellement publiés (ceci donc entre nous) …»

Le Général Claude-François de Malet (1754-1812) est détenu pour conspiration depuis plusieurs années lorsque germe en lui l’idée de faire croire au décès de Napoleon en Russie. Il prépare secrètement des décrets abolissant le pouvoir impérial et établissant un gouvernement provisoire. Il arrive à s’échapper le 23 octobre 1812 au milieu de la nuit (la présente lettre évoque la veille à 9h du soir, le doute est permis sur ce point). La suite du plan s’est effectivement déroulée comme expliqué dans la lettre : Malet rejoint la caserne de Popincourt de la Garde Municipale de Paris, puis il se rend à la Prison de la Force pour faire libérer les Généraux Lahorie et Guidal, ses complices. Ils se dirigent alors au Ministère de la Police pour s’emparer du Ministre Savary et du Préfet de police Pasquier et les mener à la Prison de la Force. Malet se rend ensuite chez le Général Hulin, qui commande la place de Paris, mais n’arrive pas à le convaincre du décès de Napoleon. Malet décide alors d’utiliser la force et lui tire dans la mâchoire. C’est finalement le Colonel Pierre Doucet qui permettra l’arrestation de Malet car il sait que l’Empereur a écrit des courriers après le 7 octobre, date prétendue de sa mort. Malet, Lahorie et Guidal sont appréhendés, traduits devant un tribunal militaire et fusillés le 29 octobre 1812.

Très intéressant témoignage.

500 EUR