[Napoléon/Pie VII]/Concordat 1813

Lettre manuscrite, Paris, le 29 janvier 1813

2 pages in-8, adresse et cachet de cire

Très intéressant témoignage d’un membre de la famille de Villevieille (probablement Philippe-Charles de Pavée de Villevieille, disciple de Voltaire, et ami de Cambacérès) sur le Concordat de 1813 entre Napoléon et le Pape Pie VII.

Depuis la signature du Concordat de 1801, les relations entre Napoléon et le Pape sont houleuses, le second reprochant au premier d’avoir rajouté 77 articles non prévus tendant à renforcer considérablement les prérogatives de l’Empereur au détriment du pouvoir papal. Napoléon, alternant promesses et menaces, arrive à faire venir Pie VII à Paris pour le Sacre, mais le Pape n’obtient rien en échange, ce qui n’arrange pas les relations entre les deux hommes. Le paroxysme de la tension sera atteint lors de l’emprisonnement du Pape en 1809. Ce n’est qu’en 1812 qu’il est transféré à Fontainebleau et quelques mois plus tard qu’il accepte de signer le Concordat de 1813, accordant de puissantes concessions au pouvoir napoléonien.

« Paris, ce vendredi 29 janvier 1813

Voilà mon cher neveu un événement important, le rapprochement du St Père et de l’empereur, nouveau concordat en vertu duquel le pape donnera des bulles à ceux des évêques nommés par l’empereur qui les attendent depuis longtemps, à ceux que nommera l’empereur d’Autriche car l’Autriche est dépeuplée d’évêques. Excepté deux tous sont morts et leurs sièges vacants. On assure, mais ce n’est pas encore bien clair, qu’il sacrera la nouvelle impératrice et son fils le prince royal [Marie-Louise et le Roi de Rome]. De son côté, l’empereur donne au pape en propriété Avignon. Il joint à ce don certains disent deux d’autres quatre et même six million, rend la liberté aux évêques et cardinaux détenus, accorde une amnistie générale, décore de ses ordres quelques cardinaux, nomme messieurs les évêques de Nantes et de Trêves (?) conseillers d’Etat et M. le cardinal de Bayonne sénateur. On croit à une nouvelle promotion des cardinaux car il n’en reste que trente-deux et le complet du sacré collège est de soixante et quelques. J’aurais désiré le pape à Rome. Il aurait été ce me semble là plus le pape du monde catholique qu’à Avignon. Mais d’un autre côté, vue la nouvelle organisation des états romains, il y aurait de l’embarras à lui donner une existence convenable. Il faut vous dire, mais comme un bruit, qu’on fait archevêque de Milan M. le cardinal Mauri et qu’on refait archevêque de Paris Monsieur le cardinal Fesch (?). L’empereur est de retour à Fontainebleau depuis mardi. Le pape y est encore mais entouré des cardinaux qui forment son conseil, et il est vraisemblable qu’il y tiendra consistoire. On chante un Te Deum dimanche prochain à la cathédrale en actions de grâces du rétablissement de la paix de l’église. Le dimanche suivant dans toutes les paroisses.

Ce samedi 30 janvier

Chaque jour ajoute ou change ici aux détails de la veille. On rend aujourd’hui à Monsieur le Cardinal Mauri l’archevêché de Paris qu’on lui ôtait hier. On croit que le pape, après avoir pris possession du comtat d’Avignon, prendra la route de Rome mais lorsqu’on y aura réparé le Vatican et qu’on lui formera un apanage dans un rayon de huit à dix lieues de cette capitale du monde chrétien. Je finis et vous embrasse et vous prie d’en faire autant à toutes les personnes qui s’intéressent encore un peu à moi à Montpellier.

VILLEVIEILLE« 

400 EUR